Il y a à peine trente ans, la communication politique était considérée comme une pratique illégitime, mais voilà qu'aujourd'hui, elle suscite de plus en plus la curiosité et fait même souvent l'objet d'études approfondies. Elle est un objet complexe, mais trop souvent réduit à une simple technique innovante, relevant d'un marketing politique. Or, la communication politique n'est en rien un objet neuf. La rhétorique utilisée dans l'antiquité grecque peut être considérée comme étant une première forme de communication politique, utilisée à des fins stratégiques de persuasion. La communication politique telle que nous la connaissons aujourd'hui est apparue à la seconde moitié du XXe siècle, avec la révolution médiatique et la transformation des pratiques. L'essor des moyens audiovisuels des médias de masse et des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC) a révolutionné nos moyens de communication, et le domaine de la politique ne fait pas exception. Jacques Gerstlé a dit qu'Internet représentait aujourd'hui l'innovation la plus marquante depuis le début des années 1990 dans les sociétés post-industrielles [1] qui sont passées d'une société pyramidale à une société réticulaire. Avec les années, Internet s'est sophistiqué. Le Web 1.0 aux possibilités limitées a laissé place à un Web amélioré, le Web 2.0 et son pouvoir de réseautage. C'est dans cette optique que sont apparus les premiers blogs, qui peuvent être définis comme étant des carnets de bord, permettant aux internautes de publier du contenu rédactionnel, mais aussi des images, du son et des vidéos. Les possibilités et les formes de communications se retrouvent multipliées grâce à Internet, et les hommes politiques ont compris qu'il s'agissait d'un moyen de communication non négligeable. Ils ont créé leurs sites Internet et leurs blogs pour diffuser de l'information, collecter des fonds pour les campagnes électorales, mobiliser l'électorat et favoriser la mobilisation.
Problématique
Dans quelle mesure ces nouveaux dispositifs sociotechniques numériques (et au premier chef Twitter dans notre cas) contribuent-ils à faire de la communication politique une pratique de plus en plus interactive ? En quoi transforment-ils les usages citoyens en matière de politique ?
Objet de l'étude
Depuis quelques années, les médias sociaux numériques, s'inscrivant dans la continuité du Web 2.0, ont fait leur apparition et sont devenus omniprésents dans nos vies. Rares sont ceux qui ne possèdent pas de compte Facebook, Twitter ou LinkedIn, par exemple, ou qui n'ont jamais surfé sur ces réseaux. De plus en plus, les politiques investissent également la sphère des médias sociaux numériques pour pouvoir étendre et multiplier leurs possibilités de joindre un électorat, particulièrement lors de campagnes électorales. À un moment où un malaise électoral se fait sentir, caractérisé par une perte de confiance de la part des citoyens occidentaux envers leurs institutions et représentants politiques qui se manifeste par de faibles taux de participation, particulièrement chez les jeunes, l'utilisation des médias sociaux devient un moyen intéressant de redynamiser la sphère politique et inciter les citoyens à s'engager. La campagne électorale de Barack Obama en 2008 a largement marqué les esprits, par son utilisation astucieuse des médias sociaux numériques et une tendance veut que les autres fassent pareil ou du moins, aspirent à s'approcher de ce modèle. Les médias sociaux numériques semblent donc, de plus en plus, faire partie des stratégies de communication politiques. Twitter, site de microblogging apparu en 2006, compte de plus en plus d'inscrits, dont beaucoup d'hommes politiques qui y ont vu là un canal additionnel à leur stratégie de communication. Et aujourd'hui, il devient presque inconcevable de ne pas assurer une présence sur ces plateformes. Ainsi, il semble intéressant de se pencher sur l'utilisation que font les hommes politiques de ces médias sociaux numériques, dans un premier temps, et de voir quel en est leur impact, dans un deuxième temps. Peter Smith et Peter John Chen affirment que la relation entre la technologie et la société est complexe et dialectique et que par le fait même, cela explique pourquoi il est normal de s'attendre à des différences dans l'utilisation des TIC à des fins politiques et électorales, même au sein d'une même société.[2] Je propose donc, dans cette communication, d'effectuer une analyse de l'utilisation de Twitter par les hommes politiques français en contexte électoral – moment de communication politique intense – dans le but de gagner des voix.
Références théoriques
Les quelques travaux récents effectués sur les usages de Twitter par les hommes politiques en France et dans le monde (Small, 2010 ; Bekafigo et McBride, 2012 ; Bouillot, Ienco, Matwin, Poncelet et Roche, 2012 ; Gruzd, 2012 ) ont conclu que les usages étaient encore principalement informationnels, laissant quelque peu la fonction caractéristique du Web 2.0 et des médias sociaux, l'interactivité, de côté.
Approche méthodologique
Mon hypothèse va dans le sens d'un usage essentiellement informationnel, mais nous supposons que les usages tendent vers de plus en plus d'interactivité au fur et à mesure que se précise le contexte électoral. Pour vérifier notre hypothèse, nous procéderons à une analyse de contenu des tweets en les classant selon leur fonction première pour tenter de déterminer l'impact de Twitter sur la communication politique, même s'il est difficilement quantifiable.
Plan de la communication
J'analyserais dans un premier temps les tweets émis par les deux candidats du second tour de la présidentielle 2012 (François Hollande et Nicolas Sarkozy) selon leurs différentes fonctions, puis, dans un second temps, j'essaierais de déterminer leur apport à la communication politique électorale et leur influence sur l'issue de la campagne présidentielle.
[2] SMITH, Peter et CHEN Peter John, « A Canadian E-lection 2008? Online Media and Political Competition ». Papier présenté à The annual meeting of the Canadia Political Science Association, Ottawa, Ontario, 27-29 mai 2009, in VERVILLE, Mélanie et Thierry GIASSON, « Les partis politiques provinciaux québécois à l'heure du Web 2.0 et des médias sociaux » Communication présentée dans le cadre du Congrès de l'Association canadienne de science politique, Waterloo, 16-18 mai 2011, p.2
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