Penser les techniques et les technologies : Apports des Sciences de l'Information et de la Communication et perspectives de recherches
4-6 juin 2014 Toulon (France)

Actes - Consultation par auteur > Soumagnac Karel

Jeudi 5
Organisations
discutants : Dominique Carré et Brigitte Chapelain
› 9:00 - 9:30 (30min)
› Salle 319
Quelles relations à Internet dans une communauté de pratiques ? Le cas des acteurs de l'éco-construction
Karel Soumagnac  1@  
1 : Laboratoire IMS  (Laboratoire de l'intégration du matériau au système)  -  Site web
Université de Bordeaux (Bordeaux, France)
351 Cours de la Libération F-33405 TALENCE CEDEX -  France

 

 

Objet

Depuis bientôt une quinzaine d'années, les dispositifs numériques en entreprise permettent des modes de coopération spécifiques et de nouvelles formes d'apprentissage (Benghozi, 2000). Pour autant, certaines micro-entreprises peinent encore à mettre en place et à utiliser les outils numériques au sein de leur activité. C'est le cas des acteurs du domaine de l'écoconstruction qui intéressent un projet de recherche mené en Aquitaine[1], regroupés sous forme de communauté de pratiques (Wenger, 1998) mais ne disposant pas d'écosystème informationnel structuré et institutionnalisé. Ils sont confrontés à la question de l'accès aux informations mais surtout à la façon dont Internet (sites, réseaux sociaux, forums) peut être utilisé pour que chaque membre de la communauté puisse se les approprier dans le cadre de son activité de travail (Guyot, 2006). Différents types de ressources numériques sont accessibles pour les acteurs de cette communauté plurielle qui a des besoins très différents suivant le type d'activité exercée. En outre, la relation aux outils et les savoir-faire pratiques ne sont pas homogènes chez ces acteurs qui pourtant travaillent ensemble sur des projets de construction dans une perspective de durabilité. Le principal problème est le manque de temps concernant l'accès aux ressources et les moyens à mettre en œuvre pour établir une réelle coordination des tâches par le biais des outils numériques. Les acteurs sont aussi confrontés à des ressources brutes issues de sites web commerciaux, institutionnels, organisationnels dont le caractère exhaustif reste un leurre pour l'acquisition de connaissances, tant la dimension communicationnelle est absente (Jeanneret, 2004). Pourtant, la maîtrise d'Internet reste une préoccupation partagée par l'ensemble des acteurs qui développent des pratiques informationnelles (Ihadjadene, Chaudiron, 2008) dont la diversité représente une forme d'« écosystème socio-technique » (Merzeau, 2010). Les logiques d'accélération du temps et d'obsolescence de l'information questionnent à la fois le positionnement de ces acteurs en matière d'usage d'Internet (Proulx, 2005) et le rapport qu'ils entretiennent avec l'ensemble des acteurs du domaine en matière de « confiance informationnelle » (Maurel, Chebbi, 2012). Comment les acteurs accèdent-ils à la diversité, à l'hétérogénéité des documents et des informations dont ils ont besoin pour exercer leur activité ? Comment se les approprient-ils dans un objectif de construction de connaissances à l'intérieur des entreprises d'une part, de la communauté réunie par un engagement social et professionnel fort d'autre part, et en l'absence d'organisation ?

 

 

Problématique

On s'interroge sur la façon dont Internet change le rapport à l'information et à la constitution des savoirs chez les acteurs de l'écoconstruction et sur les moyens de les accompagner dans ce changement pour qu'ils puissent travailler ensemble.

 

 

Méthodologie

Plusieurs approches méthodologiques ont été envisagées pour le repérage et la compréhension de l'utilisation d'Internet et des outils numériques ainsi que des connaissances circulant dans la communauté :

- une approche sociologique sur la base d'enquêtes qui mettent en lien l'analyse des contextes professionnels, la compréhension des pratiques (recherche, traitement, communication) et des représentations de l'information (maturité) à l'ère d'Internet,

- une approche sémio-pragmatique qui analyse les discours pour repérer les composants de la construction de la connaissance à travers l'instrumentation sociale et culturelle, l'instrumentation symbolique et sémantique, et enfin l'instrumentation objectale,

- une approche documentaire qui vise à analyser les systèmes d'information personnels en les mettant en lien avec la matière informationnelle produite par la communauté et à proposer des modèles de traçage de l'information

La recherche a été conduite à partir d'entretiens semi-directifs. Elle repose sur la mise en place d'une méthode de captation des besoins informationnels et documentaires, et sur l'observation de la façon dont les acteurs recherchent l'information, la gèrent, la traitent et la diffusent. Deux volets permettent d'analyser les discours et les pratiques. Le premier volet a permis d'identifier, avec les entreprises partenaires et les terrains d'observation, les thématiques informationnelles centrales voire vitales pour eux, l'idée étant d'élaborer une liste de priorités méritant le développement de ressources formatives par le biais d'un portail de ressources. Le second volet a consisté à analyser avec les professionnels, par le biais d'entretiens d'explicitation, leur système d'information personnel et à sélectionner des extraits pour identifier l'organisation de leur travail avec les outils numériques. Les pratiques informationnelles visées ne concernent pas seulement la phase de recherche d'information sur Internet mais aussi l'organisation de l'information en vue de son usage professionnel et de sa communication.

 

 

Plan de la communication

Pour essayer de répondre à la problématique posée, nous proposons, dans une première partie, de revenir sur des éléments définitoires et théoriques permettant d'appréhender les notions de communauté de pratiques, d'usage, d'utilisation, d'appropriation mais aussi de préciser les caractéristiques de la matière informationnelle dans le champ spécifique de l'écoconstruction. Dans une deuxième partie nous ferons état des résultats du projet de recherche en revenant plus précisément sur la façon dont les acteurs intègrent Internet et les outils numériques au sein de leur activité de travail, le but principal de cette intégration étant le partage et la communication de l'information pour travailler au mieux et au plus vite. Enfin, dans une troisième partie, il s'agira de faire part d'éléments plus prospectifs et permettant de montrer les prémisses de l'élaboration d'un portail de ressources susceptible de favoriser l'émergence de l'usage d'Internet chez les acteurs concernés, l'idée étant de montrer comment peut être pensé un outil numérique d'accompagnement de l'activité de travail.

 

 

Références théoriques

Benghozi P-J. (2000). « Le développement des NTIC dans les entreprises françaises. Premiers constats », Réseaux, 2000, vol. 18 n° 104, pp. 31-57.

 

 

Jeanneret, Y. (2004). « Forme, pratique et pouvoir. Réflexions sur le cas de l'écriture », Sciences de la société : Systèmes d'organisation informationnel ?, n° 63, pp. 41-55.

Guyot, B. (2006). Dynamiques informationnelles dans les organisations. Paris : Hermès publications.

Ihadjadene M. et Chaudiron S. (2008). « L'étude des dispositifs d'information électronique : approches croisées », pp. 183-207, in : Papy F., (dir.), Problématiques émergentes dans les sciences de l'information, Paris, Hermès.

Maurel, D. et Chebbi, A., (2012). « La perception de la confiance informationnelle : impacts sur les comportements informationnels et les pratiques documentaires en contexte organisationnel », Communication et Organisation, 42, [En ligne] : http://communicationorganisation.revues.org/3864

Merzeau, L. (2010). « L'intelligence de l'usager », Séminaire INRIA 2010 : L'usager numérique. Paris, ADBS, 9-37, [En ligne] : http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/52/65/27/PDF/Merzeau_intelligence_de_l_usager.pdf

Proulx, S. (2005). « Penser les usages des technologies de l'information et de la communication aujourd'hui : enjeux - modèles - tendances », in Vieira L. et Pinède N. (dir.), Enjeux et usages des TIC : aspects sociaux et culturels, Tome 1, Presses universitaires de Bordeaux [En ligne] : http://www.marsouin.org/IMG/pdf/Usages-Proulx2-2005.pdf

Wenger, E. (1998). Communities of Practice: Learning, Meaning, and Identity, Cambridge University Press.

 

 

 

 


[1] Cette proposition de communication est issue de résultats émanant du projet GCCPA (Gestion de la connaissance dans des contextes professionnels d'apprentissage) associant l'ESPE d'Aquitaine (Université de Bordeaux) et l'IMS-Equipe Cognitique et Ingénierie Humaine, UMR 5218, financé par le Conseil Régional d'Aquitaine (2012-2015).


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